Quatrième de couverture :
Elle était là, immobile sur son lit,
la petite phrase bien connue,
trop connue : Je t'aime.
Trois mots maigres et pâles, si pâles.
Les sept lettres ressortaient à peine
sur la blancheur des draps.
Il me sembla qu' elle nous souriait,
la petite phrase.
Il me sembla qu' elle nous parlait :
- Je suis un peu fatiguée. Il paraît
que j' ai trop travaillé. Il faut
que je me repose.
- Allons, allons, Je t' aime, lui répondit
Monsieur Henri, je te connais. Depuis
le temps que tu existes. Tu es solide.
Quelques jours de repos et tu seras
sur pied.
Monsieur Henri était aussi bouleversé
que moi.
Tout le monde dit et répète " Je t' aime".
Il faut faire attention aux mots.
Ne pas les répéter à tout bout de champ.
Ni les employer à tort et à travers,
les uns pour les autres, en racontant
des mensonges. Autrement, les mots
s' usent. Et parfois, il est trop tard
pour les sauver.
Mon avis :
J' étais restée sur un échec en tentant de lire l' Exposition coloniale, mais c'est avec un grand bonheur que j' ai découvert ce petit bijou si connu. M. Orsenna a eu l' extraordinaire capacité de nous transporter, et de nous faire prendre conscience des mots qui nous entourent, qui sont si pauvres, par rapport à ce que notre langue renferme et ruisselle de trésors. Celà rappelle singulièrement notre enfance, et pour ma part l' école primaire de s' entendre dire quelle est la fonction du nom, de l' article, de l' adjectif, du verbe, des adverbes.
Je me rappelle encore en CE2, le nom, "c'est ce qu' on peut dessiner", nous disait notre maîtresse.
L' auteur, lui nous l' apprend par le biais d' une histoire, une berceuse j' ai envie de dire, qui donne si joliment vie aux mots, ce même cours d' il y a quelques années seulement! Et c'est magique!
D' autant plus que les illustrations contenues dans ce livre sont très belles, c'est enfantin, simple, et joli.
J' ai beaucoup apprécié la fin ,avec le petit clin d'oeil de l' auteur à trois auteurs français, trois monuments de notre littérature, qui se retrouvent embarqués dans l' histoire que vivra la fillette Jeanne et son frère Thomas.
A découvrir pour rêver, à la chanson douce qu 'est notre langue...
Citation :
De ce moment-là, ma vie d' avant m' a fait honte, la vie d' avant le naufrage, une vie de pauvre, une existence de quasi-muette. Combien de mots employais-je avant la tempête? Deux cents, trois cents, toujours les mêmes... Ici, faites-moi confiance, j' allais m' enrichir, je reviendrais avec un trésor.